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Ports de plaisance? Eléments de réflexion de la commission maritime PCF 29

La Commission Maritime a organisé il y a presqu'un an le 14 décembre 2013 une matinée de réflexion et de travail consacrée aux ports de plaisance dans le Finistère. Au moment où le dossier du port du Diben ressurgit il nous a semblé utile de rappeler le contenu de ses travaux.

On peut aussi consulter sur les derniers rebondissements du dossier du Diben le blog du PCF de Morlaix:

http://www.le-chiffon-rouge-morlaix.fr/article-le-projet-de-port-de-plaisance-de-plougasnou-ressort-de-l-eau-avec-le-jugement-du-tribunal-administr-125038824.html

L' initiative de notre commission  s'inscrivait dans une démarche plus large qui intéresse la pratique des loisirs nautiques, les évolutions en cours et leur impact sur les politiques publiques.

Les militants communistes, les élus ont été, comme d'autres, interpellés par les projets de construction de deux nouveaux ports de plaisance, dans le Ster du Guilvinec et dans le fond du port de Primel Plougasnou, à l'Est de la baie de Morlaix.

Ces deux dossiers portés par les collectivités locales, le conseil général, la région, l'Europe, loin de faire l'unanimité soulèvent de multiples questions. Ils rencontrent l'opposition frontale des associations de défense de l'environnement et des sites, d'une partie des plaisanciers, des élus et de la population.

Pour autant on trouve aux cotés des maîtres d'ouvrage, dépassant les clivages politiques, des usagers, des élus, des associations de plaisanciers et des citoyens, persuadés que ces équipements lourds, répondent non seulement à une demande insatisfaite et qu'ils peuvent se substituer aux activités traditionnelles en déclin, relançant une forme de dynamique économique vertueuse créatrice d'emplois locaux.

A partir de ce double constat, il nous a semblé utile de pousser plus avant la réflexion collective.

Cette matinée de travail, dont l'hebdomadaire spécialisé « Le Marin» a publié un compte rendu, a réuni

11 participants représentant 5 bassins de navigation.

La synthèse des débats s'articule autour de 5 thèmes présentés sous forme de fiches.

• La plaisance, au fait c'est quoi ?

• Création d'équipements : En réalité qui décide de quoi ? Vous avez dit transparence ?

• Ports de plaisance : un impact multiforme sur les territoires.

• Un secteur en mutation.

• Accompagner, soutenir, organiser les mutations

Nous n’avons certainement pas la prétention d'avoir épuisé le sujet mais cependant nous soumettons les fruits de ce premier tour d'horizon au débat.

1/Plaisance en Finistère. De quoi parle -t-on ?

• Une des identités fortes du département qui, bien que ne concernant qu'une partie de la population et du territoire, participe de son rayonnement et de son attrait.

• Des pratiques de loisir quantitativement significatives, regroupées sous une dénomination commune qui ne rend pas compte de leur diversité sociologique, culturelle, d’approche technique.

Diversité des plaisanciers

Diversité des supports

Diversité des pratiques

Une activité fortement structurée au plan régional et départemental –services dédiés dans les administrations (Conseil Général, conseil régional, DDE/DRE), équipe de suivi et d'animation (NFEF), association d'usagers, Clubs, fédération...épaulée par les politiques publiques.

Un poids économique certains des loisirs nautique en Finistère, en Bretagne, en France qu'on ne peut ignorer ou négliger.

La plaisance en France et dans le Finistère : une spécificité nationale.

On ne peut réduire la plaisance française au riche yachtman accueillant ses invités en blazer bleu et pantalon gris sur la plage arrière de son 60 pieds.

Les conquêtes sociales que sont le droit aux vacances, le droit aux loisirs, l'émergence des mouvements d'éducation populaire, les Comités d'entreprises, les clubs municipaux ont largement ouvert le droit à la mer et aux pratiques nautiques sous toutes leurs formes. L'éventail sociologique des plaisanciers est donc très large et cette réalité impacte directement les réflexions politiques.

Quelques chiffres :

Ministère des transports données nationales 2011 :

955 656 unités dont 716 043 à moteur (74,93%) et 194 024 à voile (25,07%)

823 018 unités, 86,1 2% mesurent moins de 7 m et 57% moins de 5m

Bretagne :

226 827 unités dont 143 956 à moteur (63,46%) et 65 214 à voile (28,75%)

80,72% des navires mesurent moins de 7m

Conseil Général du Finistère

23000 places de port, 13 ports structurant, 370 sites de mouillage, 425000 personnes pratiquant annuellement, CA 319 m d'€ 3852 emplois

Nautisme en Finistère : 20 236 unités dont 1 0 468 à moteur (51 ,72%) et 721 2 à voile 35,63%

55% mesurent moins de 6 m

Remarque sur les données statistiques.

Il est parfois difficile d établir des comparaisons ou des corrélations entre les différentes enquêtes qui ne poursuivent pas toutes le même objectif.

Malgré tout il ressort que l'activité nautique de loisir n'est pas marginale en France.

Il y a 955 656 navires pour 27 000 000 de ménages.

Les embarcations à moteur se taillent la part du lion et l'écrasante majorité des navires est de taille modeste (- de 7m), voir très modeste (- de 5m).

On peut sans grand risque avancer l'hypothèse que l'essentiel de la flotte de plaisance ou de loisir se compose de petits bateaux à moteur.

Il serait malgré tout hasardeux d’établir un lien direct entre taille du bateau et CSP. Une coque semi rigide de 6m dotée d'un moteur de 100 cv coûte cher à l’achat, à l’usage et à l’entretien !

La Bretagne concentre 23% du parc, ce qui n'a rien de surprenant. On notera que ce parc est moins motorisé et que les bateaux sont de taille plus importante (relation mode de propulsion/taille?)

Ces données se confirment nettement pour le Finistère. Par contre la taille de la flotte 20 000 unités soit 8,9% de la flotte bretonne parait singulièrement faible, compte tenu de notre façade maritime

 

2/Comment naissent les décisions ?
Un déficit démocratique marqué qui fragilise les projets.

• Interrogation commune à propos des projets de construction de ports, point de départ de notre réflexion . Quel a été le moteur de ces décisions d'aménagement lourdes pour le présent et pour l'avenir ?

Comment, par quel processus d'élaboration et à partir de quels éléments objectifs la puissance publique s'est elle décidée ?

• Il y a visiblement dans ces dossiers, un déficit démocratique congénital qui tient à l'écart la population mais aussi ses représentants élus, les associations. Dans bien des cas, ces interlocuteurs naturels sont mis devant le fait accompli et sont associés pour les uns, informés/consultés pour les autres alors que les dossiers sont très avancés. On commence les études...et on discute après Il est ensuite commode de feindre l'étonnement face aux attitudes, qualifiées « d'opposition systématique », de celles et ceux que l'on a, sciemment, voulu prendre de vitesse.

• Les motivations qui fondent certaines des décisions de création d'équipement frisent l'invraisemblance ou fleure bon le clientèlisme et le renvoi d'ascenseur.

Exemple :

-Le Léon a eu le port de plaisance de Bloscon le Trégor aura Plousganou. (distance Port de Primel/Bloscon 7 milles).

-Agrandissement du Port de Guidel : toutes les autres communes y ont eu droit.

-Le Guilvinec : remplacer l'activité pêche.

• La lecture des dossiers techniques soulève bien des

interrogations. On est plus dans une relation client/fournisseur que dans l'aide à la décision.

• Il n'est dans les intentions de personne de s'opposer de manière systématique à la création de ports de plaisance. On est cependant en droit d'interroger la pertinence de projets onéreux par définition, engageant l'avenir des sites d'implantation, modifiant les équilibres socio-économiques.

Propositions :

• La participation des citoyens, des élus, des associations à l'élaboration de projets à partir d'objectifs clairement identifiés doit être au cœur de toute démarche.

• Le travail des bureaux d'études missionnés aux différentes étapes des projets se doit être totalement impartial et se situer impérativement dans une perspective d'aide à la décision.

• Le fait générateur des projets doit être une identification sérieuse, contextualisée, hors de toute pression, des besoins.

• Répondre à la question posée: Les ports de plaisance un enjeu pour le territoire.

Un peu de sérieux ne fait de mal à personne. Ne pas se tromper de cible, d'enjeu.

La tentative de réparer les dégâts des stratégies de développement économique,d'endiguer la décroissance des activités primaires par des activités de service et de tourisme accentué par les effets pervers prévisibles de la métropolisation, est vouée à l'échec.

Ex : Douarnenez les 1 000 places utilisées par la plaisance à Tréboul et dans le Port Rhu n'ont pas permis de contrarier le déclin socio-économique et démographique de la ville. La plaisance n'a pas remplacé les activités « traditionnelles » malgré une conception totalement intégrée de l'équipement créé : port à flot; musée ; cursus de formations diplômantes.. Par contre le risque d'envasement au sens propre comme au sens figuré est bien réel et le Port Rhu est de fait un parking à bateaux.

Une vision multi-polaire pour des choix complexes

Il importe de sortir d’une réflexion unilatérale, d'un processus à solution unique.

• On produit certes mais que détruit-on ? Et que prépare-t-on pour l'avenir ?

• Mettre en balance la pertinence et l'urgence des investissement.

Ex : Plougasnou coût estimé entre 25 et 40 Millions d'€ financé largement par la communauté de communes. N'y a-t-il pas mieux à faire ailleurs qui intéresse les transports collectifs, la création d'emploi, le logement social.

• Bien apprécier les évolutions sociologiques et socio-économiques qu’entraîne la disparition des activités primaires et leur tentative de remplacement par des activités tertiaires de loisir

• Prendre en compte tous les coûts et surtout les coûts d’entretien et les inévitables grosses réparations. Il n'est pas impossible d établir un plan d'entretien à long terme 5/10/15/20 ans.

 

3/L'impact environnemental : une approche nouvelle des dossiers

Nombre de ports créés quasiment ex nihilo,dans des vasières dépréciées à l'époque, en excroissances modifiant brutalement le trait de côtes, ne pourraient désormais voir le jour. De la même manière il ne viendrait à l'idée de personne de déverser les boues, extraites pour creuser le port de plaisance de Loctudy dans les zones humides les plus proches.

C'est une vision un peu optimiste de la réalité car on voit bien que dans les dossiers Plougasnou- Le Guilvinec, la qualité environnementale des lieux avaient été manifestement sous estimée. La préservation de l'environnement doit devenir un marqueur des décisions.

Se dégager des nunucheries habituelles :

Nunucherie 1 : On a eu les golfs -les greens- à la place des paysans, les lieux de création alternatifs à la place des usines désaffectées , la ruine qui fait sens à l'entrée de la résidence hôtelière. Quintessence de la paresse intellectuelle et des ambitions racornies ? Le remake des Schtroumpfs à Hagondange: un port de pêche se meurt ? Vite des pontons !

Nunucherie 2 : la vocation des ports de plaisance est d’attirer « des riches » qui vont irriguer naturellement le territoire de leurs bienfaits. Le projet du Guilvinec, porté sur les fonds baptismaux par Hélène Tanguy, comptait en plus des 700 anneaux, des résidences hôtelières, des opérations d'accession à la propriété. . .et le désir affiché d'attirer de grosses, voire de très grosses unités.

 

4/Pratiques nautiques : un secteur en pleine
mutation

Ces mutations sont observées par tous ceux qui s'intéressent à ce dossier, les institutionnels – les associations, plus empiriquement par les usagers.
C'est une des pistes de travail du bureau d'étude chargé de ce thème dans l'étude de développement stratégique des ports départementaux du Finistère.
Les causes sont multiples, externes et internes à la filière.

Causes économiques :

La baisse du pouvoir d'achat des ménages, la perte de confiance en l'avenir ont des incidences directes sur des investissements lourds non essentiels.

Causes sociologiques :

Multiplication des pratiques et des supports. Engouement pour les supports légers, d'utilisation simple et de mise en oeuvre rapide. Besoin de changer de bassin de navigation . Naviguer sans contrainte et jouir sans amarres.
Nouvelle approche familiale d'une activité à forte connotation masculine.

Causes sociétales :

Moins d’association de type « être propriétaire pour naviguer ». Pas ou peu d'activités organisées par les
clubs de voiles fédéraux et qui s'adresseraient à des adultes en dehors des traditionnels stages de voile légère pendant les vacances.

Conséquences :

La moyenne d'âge des prioritaires est largement supérieur à 60 ans et on ne note pas de renouvellement. Les bateaux sortent peu. Les ports de plaisance sont de fait des parkings à bateaux.
La pression sur les emplacements diminue. Les nouveaux équipements réalisés peinent à se remplir. Ex Roscoff. Les listes d'attentes diminuent ce qui est un phénomène nouveau.

5/Une approche renouvelée de la plaisance. Accompagner/organiser les mutations

Débat ancien dont les termes ont été posés il y a 20 ans par Nicolas Bernard. A quoi servent les ports ? Quel mode
de gestion ?
N'oublions pas les pratiques nautiques amateurs large part de sport populaire !
Il nous manque des données statistiques corrélant le type de bateaux, les CSP et l'âge.
Il importe de bien distinguer les pratiques qui ne répondent pas toutes aux mêmes logiques et ne génèrent pas les
mêmes besoins.

Retour à une activité à impact environnemental faible.

• Sortir de l'axiome : imaginé avant hier, construit aujourd’hui, conçu pour durer 1 000 ans
• S'interroger sur la conception qui prévaut aujourd'hui :un service quasiment hôtelier ou camping 5 étoiles.

Propositions:

  1. Considérer les ports de plaisance non plus comme des endroits de stockage mais  comme des lieux d’activité,d'intervention et d’animations portés par les collectivités locales et les concessionnaires.
  2. Le fil conducteur des aménagements et des équipements doit être la réversibilité.
  3. Développer les études de réutilisation -réversible bien sur des patrimoines existants non utilisés ou sous utilisés*,autrefois dédiés à la Marine Nationale, au commerce, à la pêche.

Développer la gestion dynamique et ne pas la limiter à une approche tarifaire : 

• Port à sec en complément de la place en eau,
• Service de rade,
• Conciergerie de bateaux,
• Gestion des copros,
• Aide à la mise en place et la gestion de bateaux partagés,
• Location de particulier à particulier,
• Lieux de formation et d'accompagnement des plaisanciers,
• Engagement des collectivités territoriales aux cotés des pratiques innovantes.
Le défi n'est pas de réaliser des ports mais de faire naviguer les gens.
.Sortir de la filière uniquement fédérale.

 

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Ports de plaisance? Eléments de réflexion de la commission maritime PCF 29

le 16 November 2014

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